L'analyse des réseaux sociaux sur Internet, en essor depuis quelques années, se place au carrefour de nombreuses thématiques : le rapport à soi et à son image, l'interaction avec autrui, la dépendance, le contrôle ou encore l' impuissance face à une technologie extrêmement rapide. Structurée par les algorithmes notamment, la navigation dans le web pose des problématiques associées aux traces laissées par la personne et aux systèmes de recommandations.
Dans le cadre de son ouvrage Grandir Connectés, les adolescent-es et la recherche d' information (C&F éditions, 2015) , Anne Cordier a rencontré et suivi des élèves de collège et de lycée pour étudier leurs pratiques et leurs imaginaires d' internet et de l' information. Elle souligne l' importance du rôle des enseignant-es et des parents qui, loin de se laisser dépasser par le numérique, doivent accompagner leurs enfants dans l'appropriation de l'outil numérique.
Le travail de recherche d'Anne Cordier repose sur de nombreuses enquêtes de terrain et de réflexions issues d'un travail scientifique d'observations et d'entretiens avec des adolescent-es. L'objectif n'est pas de leur rendre hommage mais de leur donner la parole. Anne Cordier défend une approche sociale et compréhensive des pratiques d' information, c'est à dire, très concrètement, l'accès au sens que l'autre donne à une situation, un objet, une pratique, au monde.
Pour Anne Cordier, adopter ce regard anthropologique est comprendre le monde social, en immersion sur le terrain, questionnant les interactions entre acteurs et entre acteurs et environnements.
Anne Cordier est maîtresse de conférences en Sciences de l' Information et de la Communication et Chargée de Mission Numérique & Innovation à l'université de Rouen Normandie - INSPE. Egalement membre de l'OMNSH (Observatoire des Mondes Numériques en Sciences Humaines) , elle s' intéresse notamment à la question des pratiques d' information des individus à l'ère numérique, et plus particulièrement celles des adolescent-es, ainsi qu'à la place du numérique dans l'éducation aujourd'hui.
Il y a une décennie, il était de bon ton de vanter l'internet comme étant susceptible de résoudre tous les problèmes de nos sociétés (relations, climat, politique et économie). Aujourd'hui, à en croire les éditorialistes, il ne faudrait plus y voir que fausse nouvelles, manipulation, addiction et complotisme. Dans les deux cas, il s'agit d'une interprétation hâtive et caricaturale. L'internet, le web et plus encore les médias sociaux, sont devenu des éléments de notre vie quotidienne. À ce titre, on y retrouve tous les éléments qui font et qui défont les sociétés. L'internet est un écosystème pleinement articulé avec notre écosystème terrestre... et l'un et l'autre sont à la fois merveilleux et en danger. Ce dont l'internet a besoin, c'est d'un nouveau récit politique, qui conjugue l'extension de la liberté d'expression, la création de nouvelles formes culturelles et la capacité d'initiative tant privée que collective, tout en évitant l'accaparement des vies privées par quelques groupes surpuissants. Et comme toujours, la politique, l'action civique et citoyenne commence par un besoin d'une culture de l'émancipation. Ce sera le rôle et la place de la culture numérique dans l'émergence d'une nouvelle citoyenneté adaptée aux conditions du XXIe siècle.
Hervé Le Crosnier est éditeur multimédia chez C&F éditions après avoir été enseignant-chercheur à l'Université de Caen. Il y dispensait des enseignements sur les technologies du web (informatique) et la culture numérique (sciences de l'information). Il a été conservateur des bibliothèques, de 1984 à 1995. Ses centres d'intérêt portent sur les relations entre Internet, et plus généralement le numérique, et la société. Il travaille également sur la théorie des biens communs, et sur la communication scientifique.
L' IRIHS a engagé un séminaire sur le numérique proposant un espace de dialogues disciplinaires sur des thématiques différenciées. Une première journée a été organisée en 2018 centrée sur la question éditoriale. Dans la poursuite de la problématique générale posée sur la question de l' interdisciplinarité au prisme des humanités numériques, l'après-midi de la journée interdisciplinaire dédiée à la culture numérique sera consacrée à des échanges au sein de la communauté susceptibles de contribuer à faire émerger des propositions de recherches pluridisciplinaires.
Entre injonction institutionnelle d'ouverture des publications, privatisation des savoirs associée à la recherche contractuelle ou encore initiatives individuelles ou collectives, professionnelles ou amateures, les pratiques scientifiques de la communauté universitaire évoluent au sein de l'espace numérique. L'ensemble des disciplines, en particulier les sciences humaines et sociales, est confrontée à de nouvelles exigences sociales, politiques ou économiques.
L' IRIHS propose notamment un cadre de dialogues disciplinaires pour débattre du numérique, transformation susceptible de réinterroger des méthodologies de la recherche, ses temporalités ou les modalités de sa diffusion.